Le " bâtiment économe " : utopie technicienne et " résistance " des usages - Centre d'Etude et de Recherche Travail Organisation Pouvoir Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2015

Le " bâtiment économe " : utopie technicienne et " résistance " des usages

Résumé

In : Boissonnade et alii, (dirs), 2014, La ville durable controversée. Les dynamiques urbaines dans le mouvement critique, Paris, ed. Petra, coll : Pragmatismes. Le secteur du bâtiment, résidentiel et tertiaire, représente environ 44% de l'énergie finale consommée en France, 18% des gaz à effet de serre et 23% des émissions nationales de CO 2. 70% de ces émissions seraient imputables au sous-secteur résidentiel, contre 30 % pour le tertiaire 2. Dans l'objectif du « facteur 4 », c'est à dire la division par quatre de ces valeurs à l'horizon 2050, les pouvoirs publics ont modifié la réglementation thermique pour la construction neuve (RT 2012) 3 et déployé des dispositifs incitatifs pour la rénovation thermique (Éco-prêt à taux zéro, Fonds d'Aide à la Rénovation Thermique du Programme « Habiter Mieux »). 4 L'analyse d'opérations de construction et de rénovation de bâtiments tertiaires et résidentiels 5 fait ressortir l'émergence d'un modèle constructif idéal typique : le « modèle de la performance énergétique et environnementale » (MCPEE) 6. Ce processus constructif repose sur une conception particulière du bâtiment, « économe » ou « basse consommation ». Il conforte le recours à la technique et à la multiplication des équipements comme facteur premier de la performance énergétique, quitte à déposséder les occupants de la gestion de leur environnement intérieur au profit de systèmes autorégulés. Il semble cependant que le primat accordé à la technique relève d'une utopie qui survalorise l'idée que la technique peut produire à elle seule la performance énergétique tout en (re)modelant les comportements d'usage de l'énergie. Cela ressemble à s'y méprendre au mythe technologique décrit en son temps par Jacques Ellul (1988). Cette croyance consiste à investir la technique d'une sorte de pouvoir d'infléchir les comportements humains en phase avec les projets de développement de nos sociétés modernes. Au service du progrès, elle est alors mise au-devant de la scène comme la solution la plus efficace pour accompagner toute démarche visant à surmonter la crise énergétique ou écologique. Pourtant, les acteurs ne restent pas passifs. Dans leur logement, ils expérimentent au quotidien les nouveaux équipements et se forgent les savoir-faire nécessaires au maintien de leur confort et de leurs habitudes de vie. C'est d'ailleurs dans cette interaction entre les hommes et les techniques que se réalise, ou non, la performance énergétique et que s'expérimentent de nouveaux modes d'habiter. Dans ce contexte technocentré, qui accorde la primauté au monde de l'ingénieur et contribue à propager cette illusion que seule la technique peut résoudre les problèmes de nos sociétés énergivores, le MCPEE pose en filigrane la question des conditions d'une véritable démocratie technique capable d'établir un dialogue durable entre les experts, les usagers et les dispositifs techniques qui, tous et ensemble, produisent la performance énergétique. Au regard de ce modèle, apparaît l'enjeu d'introduire une sociologie des modes de vie et des usages énergétiques au coeur de l'ingénierie du
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Dates et versions

hal-01756836 , version 1 (03-04-2018)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01756836 , version 1

Citer

Christophe Beslay, Romain Gournet, Marie-Christine Zélem. Le " bâtiment économe " : utopie technicienne et " résistance " des usages. J. BOISSONADE. La ville durable controversée. Les dynamiques urbaines dans le mouvement critique, Ed Pétra, pp.335-364, 2015, 9782847430974. ⟨hal-01756836⟩
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